Duquesnoy ne me croit pas. Duquesnoy croit que je joue "les faux naïfs". Duquesnoy pense que je sais quoi voter, à l’heure qu’il est. Si vous saviez, Duquesnoy !
En temps ordinaire déjà, quand il s’agit de départager deux candidats à la mairie que j’ai vus tous deux au marché bavarder avec le charcutier, ou deux candidats à la présidentielle qui ont tous deux leur marionnette, je suis l’incarnation de l’Indécision.
Jusqu’à la veille du jour du scrutin, je suis dans les affres.
Le matin, je suis au supplice.
A l’entrée du bureau de vote, j’ai les jambes qui flageolent.
Dans l’isoloir, je sors mon pique-nique. Une fois, ils ont déclenché les recherches.
Sérieusement. Jusqu’au dernier moment, depuis que j’ai l’âge de voter, j’hésite entre le vote utile et le vote buissonnier. Vous voyez Milou dans Tintin au Tibet, Duquesnoy, quand il hésite à plusieurs reprises entre l’ange et le démon ? C’est moi. Les anges du vote utile m’attirent sur la voie de la Responsabilité, du "on ne peut pas faire autrement", du "on est embarqués dans l’histoire, maintenant". Mais les démons du vote buissonnier me sussurent : "et si on essayait de tout casser, et de tout recommencer ?" "Et s’il suffisait de vouloir, après tout ?"
Et finalement, me demanderez-vous, qu’est-ce que vous faîtes ?
Oh là, Duquesnoy ! La transparence du blogueur a ses limites. Secret de l’isoloir. Rideau fermé. Conscience inviolable.
D’autant plus que ça change à chaque fois. J’ai parfois voté utile, parfois buissonnier, mais toujours choisi au dernier moment. Je suis un fléau statistique. Une aberration sondagière.
Sauf le 21 avril 2002.
Le 21 avril 2002, c’est ma fierté. Ma médaille. Mon titre de gloire.
Le 21 avril 2002, je savais dès la veille ce que j’allais voter. Peut-être même l’avant-veille. Ils ne m’ont pas reconnu, les assesseurs (ce sont toujours les mêmes, des parents d’élève, on se connait depuis que les enfants sont à la maternelle. Je soupçonne qu’ils soupçonnent mes affres). Allure décidée, fermer de rideau martial, grand sourire : méconnaissable. Sans doute une petite voix me murmurait-elle : pas de bêtise, cette fois-ci.
Alors à 20 Heures, comme tout le monde, j’ai senti la terre s’ouvrir sous mes pieds, mais heureusement, je pouvais me dire "au moins, ce n’est pas à cause de moi". Et dans les jours suivants, ils pouvaient bien venir sangloter, les flagellants de l’abstention, les éplorés du facteur, les foudroyés de Chevènement, les décillées d’Arlette. J’avais Ma Conscience Pour Moi. Aujourd’hui encore, quand je vois Borloo ou Douste-Blazy lancer un plan par jour, ou quand j’entends Dominique Ambiel expliquer qu’en fait il voulait verrouiller la portière de la voiture, je peux me dire : je n’y suis pour rien. Ce n’est pas ma faute.
Pourquoi vous parler du 21 avril ?
Parce que j’ai lu ce matin un message dans le forum de Libé. Mano Atreide, lui (elle ?) aussi, se souvient du chant des sirènes du 21 avril.
"- Moi j’vote le facteur. Y sait pas de quoi y parle
mais ca le fait bien de voter le facteur coco-réac de Neuilly. Trop hype ...
Moi je vote la coco-sectaire
Arlette. Trop top mode la Arlette, elle passe à NPA. Elle est plus Star que
Johnny (Euark again)
Moi je
vote CHevenement, tu sais, ce ressuscité de gauche, il a echappé à la mort, il
sait ce qui est important lui . En effet ... le seul ministre de la défense qui
a démissionné juste avant que les armées françaises n’entrent en guerre. Comme
si CA c’était pas le comble du politicard qui veut juste bouffer au ratelier
mais RIEN ASSUMER !!!
Moi
je vote « Parti de la loi naturelle », ils sont trop mignons. Ils vont
résoudre nos problems à coups de chdouille chdouille sur des tapis de yoga
..."
C’est idiot, mais Mano Atreid m’exprime. Il (elle ?) exprime bien les sussurements tentateurs du vote buissonnier, tels qu’ils bruissent parfois à mes oreilles. C’est idiot, mais j’ai comme l’impression que le fantôme du 21 avril va compter, dans mon choix de cette fois-ci.
Il va compter parmi d’autres facteurs (non, rien à voir avec Besancenot). L’esprit de contradiction, par exemple. Je commence à entrevoir comment le déferlement imbécile de propagande ouiste par les grands medias va me pousser vers le non. Mais l’esprit de responsabilité aussi. L’étude attentive des articles (du calme, tous ceux que j’entends d’ici me reprocher d’avoir dévié du cap initial, l’étude notariale des articles. Du calme, il nous reste deux mois, tout de même !) Mais celà va compter. La tentation de "tout envoyer ballader, et puis merde !" existe. Il faut y regarder à deux fois, avant d’y céder.
Et puis (allez, puisque cette méditation pascale est à la gravité, allons-y jusqu’au bout), au milieu de tous les facteurs qui compteront, il y aura la paix. Vous savez, la paix ? Vous savez, cette phrase des ouistes, à la télé, qui parait expédiée comme une clause de style, au début de la liste de toutes les bonnes raisons de voter oui. Mais si, souvenez-vous, vous avez forcément entendu DSK, de sa belle voix grave : "d’abord la paix, bien entendu".
Pour moi, la paix n’est pas "bien entendu". Je vis depuis quarante-sept ans dans un continent en démocratie, et en paix. J’appartiens à la première génération depuis la nuit des temps qui jouisse de ce privilège. Et croyez-le ou non, j’en suis pleinement conscient chaque matin.
Je me souviens d’une des premières images de télé qui m’aient frappé, lors des guerres de Yougoslavie (je venais de commencer la chronique-télé du Monde). On y voyait des combattants, dans une ville, s’abriter des tirs adverses dans une encoignure de porte. Et dans cette encoignure, à l’arrière-plan, on pouvait voir des interphones et des digicodes. J’en avais été saisi.
On pouvait donc se faire la guerre, au siècle des digicodes. Mercenaires et digicodes. Criminels de guerre et digicodes. Camps de prisonniers et digicodes. Ruines et digicodes. Charniers et digicodes. Ces associations de mots étaient possibles.
Donc oui, je crois que la guerre est toujours possible. Oui oui, en 2005, en Europe. Attention, amis nonniens, je ne pense nullement que si la France vote non, les armées polonaises, anglaises et lituaniennes vont se mettre en branle au matin du 30 mai, pour venir châtier les rebelles. J’ai simplement la conviction que la guerre est toujours possible. Et oui, je tiens à l’Union Européenne comme à un trésor.
Donc ?
Donc rien. Rien de plus pour l’instant. Quel que soit mon vote final (et à l’heure qu’il est, vous avez compris que je n’en sais rien encore) il sera celui d’un type qui tient à l’Union Européenne comme à la prunelle de ses yeux.
C’est, je trouve , une belle image de l’homme moderne que celle de DS dans l’isoloir : solitude et angoisse du choix.
Aura -t-il à ce moment crucial l’esprit éclaici par 2 mois de blog et d’exégèse ? Qui aura pu l’aider à choisir entre le coeur et la raison ? Tout vote demande un choix impossible où l’esprit se croit toujours perdant .
Je propose donc une sortie : penser non et voter oui .
Il semble que la première démarche pour se positionner sur un vote aussi ‘simpliste’ que oui/non consiste a connaître exactement la question posée, càd :"Approuvez-vous le projet de loi qui autorise la ratification du traité établissant une Constitution pour l’Europe ?"
La seconde démarche est de s’enquérir du contenu du traité .
Là les choses se compliquent car il ne s’agit nullement du seul corps du traité tel que reproduit par de nombreux médias, y compris le texte distribué officiellement et gratuitement dans les postes etc...mais bien d’un ensemble de textes dont la liste figure (entre autre) sur le site du Conseil Constitutionnel.
Acte final, Traité établissant une constitution pour l’Europe, protocoles (36), annexes et déclarations A et B...
En effet, les textes qui ne seront pas ou peu lus sont souvent les plus intéressants. Je suis fracassé par l’argumentation que développent les journalistes dit politiques et dont les interventions ne font que révéler leur ignorance du texte dont le corpus général dépasse, en effet, les 800 pages. Il en est malheureusement de même pour les ‘hommes politiques’ qui interviennent sur le sujet, y compris ValyGiscard, pourtant principal concepteur du projet.
Juste à titre d’exemple, un extrait de la première page de la déclaration N°12 (Déclaration concernant les explications relatives à la Charte des droits fondamentaux) et qui semble cristalliser une partie des débats entre partisans du oui et du non :
[...]Les explications qui figurent ci-après ont été établies initialement sous la responsabilité du praesidium de la Convention qui a élaboré la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Elles ont été mises à jour sous la responsabilité du praesidium de la Convention européenne, compte tenu des adaptations apportées au texte de la Charte par ladite Convention (notamment aux articles 51 et 52 (Articles II-111 et II-112 de la Constitution)) et de l’évolution du droit de l’Union. Bien que ces explications n’aient pas en soi de valeur juridique, elles constituent un outil d’interprétation précieux destiné à éclairer les dispositions de la Charte. [...]
Alors, messieurs, l’avis d’un simple instituteur est tout simplement : avant de répondre à la question de l’autorisation (oui ou non), répondez à celle-là : L’AVEZ-VOUS LU ? (et plusieurs fois, si possible)
L’avis du citoyen sera autre : poser une question aussi réductrice sur un texte aussi long, compliqué, et dont la principale caractéristique est d’énoncer des principes pour ensuite les réglementer au point de leur faire dire le contraire (c’est assez souvent le cas, vous LIREZ) montrent les limites actuelles non pas de la Démocratie mais de ses acteurs principaux, nos élus. Plus simplement, à force de nous prendre pour des CONS, il ne faut pas qu’ils s’étonnent que les citoyens décident que ce n’EST PAS UNE CONSTITUTION mais bien la ‘popote’ habituelle à laquelle ils nous demandent d’apposer la marque ‘approuvé par le peuple’ qui introduit (encore) la Constitution Française.
mon interprétation, certes simpliste, mais éclairée par la lecture suivie tant de la génèse du texte ( on peut lire les différents travaux depuis plus de 3 ans) que des textes adoptés par les gouvernements, peut cependant se résumer ainsi : l’Euro , initialement instrument d’harmonisation économique au service du Politique (au sens réel) va se voir consacré ( car il l’est déjà plutôt plus que moins) comme arme économique au service des fluctuences du Marché...
Merci , Mr Delors, qui en 91 a jeté aux électeurs : ’ Votez pour Masstritch, nous ferons l’Europe sociale ensuite...’ 3 ans après(1994), 11 états sur 15 étaient gérés par des gouvernements ’’socialistes’’...et ont accouché d’Amsterdam et de Nice.
Est-ce vraiment la Masse qui Triche ?
Bonjour Daniel,
Je suis en accord avec vous : la paix est notre bien le plus cher et doit passer avant toute autre considération. S’il fallait choisir, hypothèse absurde, entre la guerre en Europe et la sauvegarde de notre protection sociale, de notre doit du travail, de notre niveau de vie ou de la diversité culturelle, peut être mieux vaudrait il tout sacrifier pour la paix.
Mais il me semble que les droits des citoyens, l’existence d’un mode de décision politique démocratique ou la liberté d’opinion et d’expression favorisent la paix entre les peuples et que les mêmes gouvernements qui font la guerre, la font également à leurs citoyens en les privants à cette occasion de nombre de leurs droits fondamentaux.
Le progrés conduit au progrés, comme toute régression sociale nous conduit à toujours moins de droits pour les citoyens.
La construction européenne s’est faite en période de paix entre les Etats qui ont participé à ce projet, elle en est même la justification première, éviter une nouvelle guerre franco-germanique. Est elle pour autant la raison de ce demi siècle de paix ? Difficile à dire. Emmanuel Todd dans son essai "Après l’empire" apporte un élément, il existe une thèorie dont j’ai oublié le nom du théoricien, selon laquelle les Etats démocratiques libéraux (en opposition avec démocratie autoritaire) ne se font jamais la guerre entre eux. Théorie qui semble assez juste.
Toutefois, on peut penser que des peuples habitués à voyager les uns chez les autres, à échanger, et pas uniquement des marchandises, à partager de la culture, des émotions, des institutions, un destin commun,etc... seront moins enclin à suivre d’éventuelles sirènes bellicistes.
Et pour ces raisons, je suis pour ma part favorable à une construction européenne qui permette une défense commune, une diplomatie commune, une fédération d’Etats constitutant une République européenne démocratique, bref à une évolution de l’Europe vers plus d’intégraton afin que nous puissions, au fil des siècles constituer une Nation européenne.
Mais le traité constitutionnel est le triomphe d’une conception dans laquelle l’Europe doit se limiter à offrir un marché intèrieur à ses citoyens, une vaste zone de libre échange comme l’Alena ou comme le fut l’AELE. Et, l’adoption de cette constitution, me semble-t-il, ne permet pas de dépasser ce stade en raison de son impossible révision, sauf sans doute sur des détails techniques.
Mais, pour terminer, ce qui me semble nuisible pour l’amitié entre les peuples et donc constitue une menace potentielle pour la paix, certes encore lointaine, c’est que l’Europe actuelle et que la constitution ne nous permettra plus de changer, dresse les citoyens européens les uns contre les autres. En organisant de fait les délocalisations intra-communautaires, par l’interdiction de toute harmonisation sociale et fiscale dans un espace de libre circulation des marchandises, services, capitaux et travailleurs. Le maître mot de ce texte n’est pas coopération entre les Etats, entre les citoyens mais concurrence. Par la concurrence libre et non faussée, elle dresse les peuples les uns contre les autres pour la défenses de leurs intérêts devenus antagoniques, plutôt que de leur promettre à tous un haut niveau de vie, de protection et de solidarité.
A défaut de l’Europe de la guerre, le traité constitutionnel organise l’Europe de la guerre économique.
PS : Le contrat n’est pas rempli, pas un seul article cité, mais comme vous en avez fait l’expèrience, cher Daniel, ce texte casse-tête est si complexe que tout affirmation reposant sur un article peut être combattue par la comparution d’un autre article ou bout d’article sans qu’on sache lequel est le principe, lequel l’exception. Donc pour faire reposer un point de vue sur des articles sans offrir le flanc aux critiques de ceux qui y verraient une falsification, il faudrait pour être exhaustif et tout à fait "objectif" citer à chaque fois une grosse poignée d’articles, chacun renvoyant à un ou plusieurs autres.
D’ailleurs, impossible pour un non juriste à plein temps de se faire une opinion sans s’appuyer sur les critiques des partisans des deux camps. Et donc pour ceux qui hésitent, faute d’être sûr d’avoir tout compris, le plus sage serait de voter contre, ainsi qu’on pourrait le conseiller à toute personne en position de signer un contrat dont il ignore à quoi il l’engage.
La démocratie se doit d’offrir des alternatives claires, or, en l’espèce, un citoyen qui voudrait enfin l’Europe sociale, se voit proposer en votant "oui" plus d’Europe sociale et la voie de l’Europe sociale, par François Hollande et même Sarkozy, et en votant "non", par les militants de gauche, la possibilité d’éviter un système qui interdit à jamais une quelconque Europe sociale. Un des deux camps ne joue pas le jeu démocratique et la complexité du texte lui autorise cette escroquerie.
Je continue à linker le site de Lipietz (non que cela soit mon idole absloue mais ses arguments sont construits et il me semble savoir de quoi il parle).
Cette fois-ci, il reprend un par un les 20 arguments verts en faveur du non. Dans la mesure où de nombreux de ces arguments sont entendus de tous bords, il me semble que l’argumentaire de Lipietz est intéressant pour de nombreuses personnes.
En ce qui me concerne, il m’a convaincu.
Je suis moi aussi particulièrement hésitant au sujet de ce que je dois penser de ce texte. Cela fait même plusieurs semaines que je penche tantot pour le oui, tantot pour le non.
Finalement, j’ai lu cette analyse d’Alain Lipietz qui a le mérite d’être simple et de dire les choses en face : non, ce traité n’est pas parfait loin de là mais au moins il ouvre la porte à de nouvelles réformes. De plus, le refuser signifie justement accepter les articles qui nous déplaisent car ils sont déjà en vigueur.
Merci, Monsieur Schneidermann, pour votre prise de position claire et votre rappel de l’état de paix dans lequel nous vivons. Je conserve précieusement la réponse que vous m’avez faite lorsque je vous ai envoyé un message à propos de votre chronique martienne ou morandinienne, dans Libération. Il est tard, je me relève juste une petite heure, je reproduis donc in extenso le message que j’ai déjà envoyé sur plusieurs fora, et qui résume ma pensée. Nous devons voter oui. Malgré la nullité de nos élites. Malgré l’insignifiance de l’Histoire en mouvement (hein, Fulca), etc. A bientôt. Raphaël, coursapied.
« Coucou, tout le monde. Je n’interviens pas beaucoup en ce moment sur les fora, pour des raisons personnelles. Des raisons qui rejoignent la question soulevée par ce sujet, le Traité portant sur l’institution d’une constitution européenne. Je découvre l’histoire de ma famille, cette histoire qui a traversé l’Histoire, notamment la deuxième guerre mondiale, parce que ma grand-mère était juive. Le procès Papon diffusé sur Histoiire fut une nouvelle fois une prise de conscience, à un niveau supérieur de l’implication de l’histoire et de l’Histoire.
Je vous la ferais courte. Mon grand-père a obtenu son diplôme de Polytechnique, puis de l’Ecole des Mines. Comme Louis Leprince-Ringuet, et comme leurs pères respectifs. Quand on est diplômé d’une école d’un tel niveau, on rencontre, quel que soit son niveau social, l’argent qu’on a, on rencontre des gens importants. Mon GP s’est marié à une juive. Ils sont simplement tombés amoureux l’un de l’autre, et la religion est pasé au deuxième plan. Mon GP est resté catholique, et MGM n’a pas souhaité rendre ses enfants juifs. Mais ça, les nationaux-socialistes s’en fichaient. Cette famille, ce couple qui avait déjà cinq enfants, avant la rafle du Vélodrome d’Hiver en juillet 1942, a eu une chance extraordinaire : Jean Bichelonne, le ministre du Travail du Maréchal Philippe Pétain, est venu le 15, une journée avant la grande rafle parisienne, au bureau de MGP, en personne. Partez. Laissez tout. Partez. Vite. Vite. Le soir, MGM embarquait à Marseille dans un bateau pour le Maroc. MGP cachait ses enfants dans le Pays basque. Il fut prisonnier un peu plus tard. Il s’enfuit de sa prison. Fut repris. Et réussit une deuxième fois à s’enfuir. retrouva MGM en mars 1944. A ce moment-là, ma maman fut conçue, dans l’urgence, la joie des retrouvailles, et surtout la peur. La vie fut plus forte que tout.
Au nom de tous ceux qui n’ont pas eu la chance de mes grands-parents, au nom de ceux qui sont morts de façon terrifiante, au nom des soldats américains qui sont tombés pour nous libérer, au nom des résistants, au nom des morts de la Première guerre mondiale, au nom des morts de la guerre de 70, au nom des morts des nombreux conflits guerriers qui opposèrent l’Angleterre et la France, pour le souvenir de tous ces gens, pour qu’on ne les oublie pas, votons oui. Oui avec le sourire. Un oui de conviction. Un oui offensif, un oui joyeux, un oui de fête. Pour fêter la Paix. Pour fêter nos enfants qui mangent à leur faim. Pour fêter nos médecins qui nous soignent. Pour fêter nos pompiers qui éteignent les feux. Pour fêter la police qui obéit à des lois votées démocratiquement. Pour fêter cette démocratie. Un oui pour fêter les liens qui nous unissent aujourd’hui avec l’Allemagne. Un oui de joie, de champagne pour, à l’image des noces renouvellées entre époux tous les dix ans, tous les vingt ans, fêter la paix qui dure et qui s’installe. Un oui pour laisser une Europe en paix pour ceux qui suivront.
Ne laissons pas les Cassandre gagner. Ne laissons pas les ultra-libéraux gagner, car eux aussi rêvent de voir l’Europe politique ne jamais voir le jour, car elle bloquerait leurs desseins. Ne laissons pas les communistes qui ont le sang de dizaines de millions de personnes sur les mains, triompher. Ne laissons pas les héritiers du national-socialisme qui ont tué mes grands-oncles, mes grandes-tantes, parader avec notre drapeau à la main, dans les rues de notre France.
Pour une naissance politique de l’Europe, pour une Europe qui prendra en compte les aspirations sociales des Français et aussi des Allemands, pour une Europe qui puisse enfin parler d’égale à égale avec les Amériques, les Indes, la Chine, la Russie, pour une Europe qui aidera l’Afrique à prendre enfin son envol, pour une Europe qui sera un interlocuteur fiable au Moyen-orient et dans tous les endroits où le chaos et le désordre règnent, car du chaos et du désordre naissent les totalitarismes, pour cette Europe possible, votons oui. OUI, OUI, et OUI ! »
Je suis de plus en plus déterminé pour le NON au TC. Un vote est un message. Comparer le TC avec l’élaboration de la constitution américaine est stupide. Nous sommes dans une autre époque. Le citoyen, s’il veut être éclairé, n’a pas d’autres moyens que d’user de sa liberté et de se donner des Raisons de voter OUI ou NON. Je n’ai aucune raison de voter OUI, j’en ai des tas pour voter NON. Si je veux faire campagne et m’engager, alors il me faut développer ces raisons. Et sur ce point, c’est assez facile. En fait, le camp le plus fragile est celui du OUI. C’est le camp du vent, du statu quo, de la continuité.
Ceux-là ont sans doute besoin d’être rassurés. Les plus faibles croient au discours sur l’Europe incubateur et mère protectrice contre une globalisation qu’elle contribue à faire avancer, ce qui n’est pas le moindre des paradoxes (la globalisation ne me pose pas problème, le paradoxe oui, car il renvoie à la bêtise de l’opinion). Les plus forts voient un levier pour conduire leurs affaires. Oligarques, politicards en mal de domination, grands groupes industriels aux desseins expansionnistes... économie Empire.
Le dilemme du NON réside dans un même schème au niveau de la protection. Sur ce point, ils ont tort et le NON des peureux n’ajoutera rien à l’Histoire, pas plus que le OUI. La seule légitimation du NON repose sur une sortie du cadre, de tous les cadres, de tous les moules et les modes de pensée. Sphère technique, modifier la structure monétaire. En finir avec l’asservissement et la pression imposée par la BCE. Sphère politique. En finir avec ce jeu de dupes et d’approximation que le traité de résoudra pas. En finir avec cette bureaucratie qui veut faire marcher à la baguette les nations européennes au détriment des politiques culturelles et spirituelles. Sphère du sens. Recadrer dans l’Histoire le référendum et faire du NON un acte de sens supérieur. Une défiance face aux élites. Courage citoyens. Honnêtement, je ne pense pas que ces conditions soient réunies. Mais un corps révolutionnaire peut parvenir à infiltrer les consciences, les libérer, et décontaminer les citoyens de cette propagande insidieuse que nous distillent les médias. L’Histoire a été faite par les avants-gardes. C’est l’échec de mai 68 que ne de pas avoir su se constituer en avant garde. Les erreurs de mai doivent servir d’enseignement.
Ce texte est un brouillon synthétique qui livre l’essentiel. Sinon, vu le nombre de chômeurs en Allemagne et en France, vu la pauvreté qui avance, j’ai au moins une raison de dire NON. Au moment du référendum de Maastricht, le président de la banque centrale allemande jouait sur les chiffres, convenant que si le chômage dépassait les 4 millions, il serait bon que la banque fasse quelques efforts. Des PDG en appelaient à l’économie et à la monnaie unique jugeant qu’il était essentiel de donner des hommes aux machines. Vous avez oublié, pas moi. Vous avez toute votre liberté de citoyen pour accepter cette servitude, surtout si vous êtes bien placés pour en profiter. Pour ma part, je ne cautionne pas cette Europe et rien qu’au nom de tous les laissés pour compte je voterai NON, par dignité, par sens moral, par refus des compromissions. L’Europe, cette expérience technicienne où nos enfants sont des cobayes, je n’en veux pas. L’Europe qui fait l’expérience de la croissance, je n’en veux pas. Hélas, nous n’avons pas d’autres schémas à proposer (moi si). Des schémas qui servent de principe directeur pour que l’on prenne plaisir et passion à avancer ensemble. Cette Europe ne me fait pas bander, elle n’a rien de sexy, elle a détruit l’Eros et l’Amour. Je déteste l’Histoire qui se fait en ce moment. Je ne supporte plus la pleutrerie de mes contemporains. Je ne désire qu’une chose, que la classe technocratique, médiatique et politique se prenne une baffe démocratique comme elle le mérite. Et pas question de céder au chantage. Le NON n’est pas un 21 avril comme veulent le faire croire les socialistes et même l’UMP mais c’est un 1789. Nous aussi citoyens avons la liberté de choisir le sens de notre action. Si une campagne doit se dérouler sur le net, elle devra obéir à ce principe d’ouverture et de libération du sens, de la pensée, de l’imagination.
Pour l’instant, je ne développe pas plus. C’est une prise de position personnelle dans ses motifs mais sociale pour ce qui relève de la situation des nations et des entorses à la dignité des exclus, et universelle eu égard aux nécessités de développer les sciences, les Arts, la Culture, la Civilisation. Je déteste cette Europe du moyen terme, bourgeoise, technicienne, matérialiste, grégaire, vérolée par des idéaux de puissance, je vote au parfum des fleurs et du muguet, pour m’affranchir de cette puanteur technocratique. Pouvoir une fois dans sa vie tirer la chasse pour évacuer les pensées galvaudées de nos élites, Chirac, Raffarin, DSK, Hollande, Lang, Barnier, Bayrou...
C’est un jardin extraordinaire, comme chante Higelin. Le printemps des poètes contre l’Europe des sanisettes. Quant aux peoples qui défendent le OUI, je leur fourre mon doigt dans le cul, de Sollers à Balasko. C’est ma manière de leur parler, au niveau où ils se situent.
Que l’on vote oui ou non au référendum, cela ne changera absolument rien pour les laissés pour compte.
Le chomage n’augementera pas avec un Oui, et ne baissera pas avec le Non. Une entreprise embauche lorsqu’elle a des besoins de main d’euvre et qu’elle ne peut pas faire autrement. Des localisations existent pour le moment, d’accord. Mais bientot les pays ou la main d’oeuvre existe vont augmenter petit à petit leur niveau de vie, du moins il faut l’esperer. Pour moi, c’est complêtement indépendant.
Cela dit, la liberté de choix existe, mon choix est fait. Une constitution n’est en aucun cas gravée dans le marbre (cf les constitutions françaises). Je pense que nous devons reagir en tant qu’Européen au niveau mondial, la France n’est plus qu’une région. D’abord, je ne suis pas Française à la quatrieme génération mais Europeene, ensuite je ne suis pas toujours restée en France. Ma façon de pensée est surement différente de la votre, acceptez le.
Par contre, je suis d’accord sur sur le terme sur le fait que l’Europe est "bourgeoise, technicienne, matérialiste" mais pas sur le terme "grégaire". Grégaire par rapport à qui ou à quoi ? Les pensées galvaudées de nos élites ne peuvent pas être modifiées, il faut faire avec. Surtout ne pas s’en plaindre et vivre avec les idées que l’on a en soi. Personnellement, je ne les cautionne pas toute. La seule chose dont on devrait se plaindre est l’extrémisme qui impose une pensée unique
L’Europe grégaire c’est celle des masses consuméristes, des foules dans les stades, pour le foot et les stars. Bref, je préfère me taire
Quant à Non, oui ça peut changer si ce Non est explicite est accompagné d’un contreprojet car on connaît les raisons de la pauvreté mais l’ignorance économique et la propagande médiatique masquent la question, d’où ta remarque qui est infondée parce que tu es ignorant, parce que le système t’a laissé dans l’ignorance ou que tu ne veux pas penser. Pour savoir ces liens à consulter
Cher Daniel, quand est il exactement du pluralisme à "Libé", ce journal de "gauche" qui à force de parler de "byciclette", "google", "d’élus Verts qui se baignent dans la Seine sous les caméras", "gauche raisonable" me semble oublier ce qu’est le débat d’idées ?
Certes, il y a encore quelques bons papiers dans la rubrique "Rebons", mais pour moi comme pour beaucoup d’ex lecteurs, "Libé" c’est devenu un produit Marketing, poit barre.
L’enveloppe est jolie, l’Alamnach est "habillé" par Christian Lacroix, la pagination est réussie.....quand au contenu, je trouve que de plus en plus, il laisse à désirer...."Libé" défend les syndicats raisonables, réformistes, etc....blablabla......tout ça moi j’appelle ça être faux cul ....et on a été l’an passé 12000 de moins à se laisser berner par ce type de journal, qui comme l’Obs ose s’appeler journal de "Combat"..Combat peut être, mais pour l’ordre établi oui !
Ne crois tu pas que July, Thenard and Co..... croient qu’être de gauche aujourd’hui ça veut dire faire, penser, agir comme Chérèque, BHL, Con Bendhit ou Baroso ?
Parce qu’à moi, les ex Mao (à qui il faut ajouter désormais l’ex coco contre son plein gré, ce cher Bernard T. qui a force de tourner autour du pot sur le TCE tombera dans les mêmes oubliettes que son pote François, celles de l’histoire), ils me font encore plus peur qu’un Selliere, qui a une très grande qualité que nous devons tous lui reconnaitre.
Et oui ce cher Baron , au moins, il ne cache pas son jeux ! Et oui, lui il votera OUI car la Constitution "protège les marchés et emêche toute harmonisation fiscale et socale par le haut". Il l’a dit, il a eu le courage de le dire...Alors Ernest Antoine, je te respecterai désormais encore plus que ce cher François ou ce cher Serge, car eux ils jouent aux faux culs, et ça c’est insupportable.
Et ça, c’est tout à son honneur.
Et oui parmi les ex de 68, il y en a comme Con Bendit qui militent pour une baisse des allocs chomage et une baisse des impots sur les sociétés et il reste encore dans notre beau pays de raleurs quelques illuminés, dont je fais partie qui ne disent pas à ce cher François Chérèque de m’avoir fait passer des ASSEDICS au RMI alors que j’ai 3 enfants à charge...C’est vrai que dans d’autres pays modernes, les illuminés comme moi, ils ne votent même pas, on ne les voit plus, on les cache, donc ils ne posent pas de problème....
Je ne pensais pas avoir à vous ranger aux côtés des beaufs de gauche (attention, je ne dis pas que vous en êtes) se glorifiant d’avoir voté Chirac au deuxième tour et n’ayant eu de cesse (pour se donner bonne conscience ?) de culpabiliser ceux qui ont cru qu’en démocratie le vote ne se limite pas aux deux candidats désignés à l’avance comme les deux candidats principaux.
La vrai raison du 21 avril, elle est expliquée ici par Denis Sieffert :
http://www.politis.fr/article1272.html
Alors, la culpabilisation, ça suffit ! Aujourd’hui, ce sont ceux qui nous ont conduits dans le mur qui se retrouvent en charge d’élaborer le programme "socialiste" pour 2007. Comment voulez-vous après ça qu’il n’y ait pas de nouveaux 21 avril ?
Sur la question de la paix, encore une fois j’ai l’impression que vous êtes tout de même assez sensible aux arguments de ceux qui n’ont que l’agitation de la trouille comme fond de commerce (en plus, vous appuyer sur ce ripou de DSK, c’est le pompom !). Je ne mésestime pas le non des souverainistes, mais il est marginal par rapport aux tenants du oui et du non des principaux partis qui sont tous pour la poursuite de la construction européenne. L’enjeu n’est pas la paix, qui peut être compromise quel que soit le résultat du référendum en France, l’enjeu, c’est tout simplement plus ou moins de social et une constitution limitée à son rôle de constitution.
« La vrai[e] raison du 21 avril, elle est expliquée ici »
Ce ne serait pas un peu prétentieux de s’afficher comme détenteur de la vérité vraie du 21 avril ex post ?
L’argumentaire de l’extrême-gauche sur ce sujet est tout aussi stratégique qu’une double page dans Paris-Match. François Hollande a tout intérêt à se présenter comme un présidentiable, Denis Sieffert a tout intérêt à le présenter comme un social-traître.
Vous avez raison, dans la formulation j’aurais dû écrire "la raison qui me paraît la plus vraisemblable". En tous cas, j’attends toujours que l’on me démondre que le score de Jospin du premier tour était "normal" et que le score de Le Pen était inhabituellement élevé. Je crache à la gueule de qui osera dire que le 21 avril, c’est de ma faute, surtout si celui qui dit cela a voté pour ceux qui ont fait la courte-échelle au gros blond pendant que je me faisais casser la gueule par ses nervis.
Quant à qualifier Politis d’extrême-gauche, faut tout de même pas pousser. Lénine a inventé le qualificatif de gauchiste pour éliminer ceux qui essayaient de le déborder par la gauche. Alors dire que l’on est d’extrême-gauche parce qu’on a quelques préoccupations sociales ou écologiques ou parce qu’on trouve que François Hollande n’est pas très photogénique, c’est un peu fort de café. Politis, c’est un canard qui se veut "citoyen". Pour ma part, je trouve qu’ils sont un peu mous du genou. D’ailleurs, parmi ceux qui publient des tribunes régulièrement, on trouve des Verts comme Mamère ou Lipietz (partisans du Oui) au milieu de quelques rouges et de pas mal de roses plus ou moins pâles.
C’est quoi la Pesc ? La Politique étrangère et de sécurité commune. Si ça vous dit, vous pouvez vous reporter à l’article I-41 "Dispositions particulières relatives à la politique de sécurité et de défense commune" du traité et si vous n’y comprenez rien, tenter d’en lire cette analyse "Autant en emporte la Pesc". On peut pas dire que ce soit lumineux.
Plein d’autres articles sur la constitution sont à lire sur le même site.
Bonne lecture et bon courage !